vendredi 23 octobre 2015

Père Noël, cloches de Pâques, petite souris, pièges à Schtroumphfs et passe-sel

Enfant, j'ai été confronté à quatre grands mensonges institutionnalisés. Ce sont des mensonges sympas, faits pour nous rendre la vie plus belle, et je ne les regrette pas du tout... D'ailleurs j'en perpétue la majorité auprès de mes enfants, car ce sont ces belles histoires qui, avec la naïveté enfantine, donne toute sa magie à la vie...
Je veux parler ici des cloches de Pâques, du Père Noël, de la petite souris et de Dieu. Bon, j'entends d'ici les cris d'orfraie des croyants scandalisés que je compare Dieu au Père Noël ou à un rongeur collectionneur de canines. Sans rentrer dans le détail de mes convictions athées, je vous assure que de mon point de vue, la jolie histoire de Dieu créant le monde, dictant de manière plus ou moins obscure comment y vivre pour se retrouver au final tous dans le paradis éternel après la mort ressemble tout de même pas mal à une fable permettant de répondre de manière simpliste aux grandes questions : D'où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Avec un zeste de machiavélisme humain permettant une légère manipulation des masses en passant... D'où les rapprochements que je fais avec le fameux : "Attention, le Père Noël te regarde, il n'apporte des cadeaux qu'aux enfants sages..." qui permet aux parents d'acheter la tranquillité à peu près tout le mois de Décembre...

Bref, dans ma famille, ces traditions étaient très importantes. Et mes parents firent tout pour maintenir la magie le plus longtemps possible. Ils y parvinrent avec plus ou moins de succès selon la crédibilité de l'histoire.

Pâques et ses cloches
Je me souviens avoir remis en cause tout d'abord l'histoire des cloches de Pâques, dès l'âge de 5-6 ans je pense. Des cloches qui volent, ramenant du chocolat de Rome pour le déposer pile dans le jardin... Cela suscitait beaucoup trop de questions et d'incohérences... D'abord, on ne les voyait jamais passer. Ensuite, des cloches, ça n'a pas d'ailes, et c'est super lourd. Et enfin, les trois arguments qui m'ont fait penser que tout ceci était parfaitement fantaisiste : où une cloche pouvait-elle ranger tous ces œufs et autres chocolats pour le vol du retour ? Par quel miracle récupèraient-elles à Rome exactement les mêmes œufs que ceux qu'on pouvait trouver dans notre supermarché ? Et surtout, à midi, on les entendait rentrer, elles sonnaient à toute volée mais en fait, j'avais bien repéré qu'elles n'étaient pas parties du tout : elles avaient sonné onze fois à peine une heure auparavant et même un petit coup discret une demi-heure avant leur retour... En plus, parfois, à midi, elles n'étaient pas passées mais le chocolat apparaissait seulement quelques heures plus tard. Et quand il pleuvait elles passaient dans le garage ?? Non, mais sérieusement...

Mes enfants de 5 et 7 ans commencent à en douter largement. Heureusement, je leur ai fait croire une fois que je les avais vu passer au-dessus du quartier et ma fille a affirmé les voir s'éloigner aussi... Pouvoir de la persuasion. Et en se rendant sur place, ô miracle, il y avait des œufs dans le petit square au-dessus duquel nous les avions vues !
Et cette année, pour couper court aux doutes alimentés par les copains de l'école qui disent que ce sont les parents, j'ai mis en fond sonore les cloches de Notre-Dame une trentaine de secondes à fond dans le salon (merci Youtube), le temps pour eux de descendre de leur chambre juste avant que la cloche ne s'enfuit... Elle était entrée dans le salon ! Incroyable. Et dans la panique, elle a semé des œufs un peu partout dans le jardin et la maison. Sacrées cloches...

Dieu, le petit Jésus, l'esprit sain, la Vierge Marie et tutti quanti
La deuxième fable dont j'ai éventé l'imposture est celle de la religion. Durant mon CP, j'ai fait une petite année de catéchisme, que je n'ai sans doute pas terminée. Ma mère se souvient distinctement la conversation qu'elle avait eu avec l'animatrice, passablement agacée par mes questions durant les cours et mon scepticisme qu'elle craignait contagieux : non, je ne voulais pas admettre que Marie ait eu un enfant sans rapport sexuel. Déjà à cet âge, c'était aberrant par rapport à l'histoire de la conception que mes parents m'avaient expliquée à grand renfort de "petites graines" qui se rencontrent dans le ventre de la maman et qui me semblait bien plus crédible. Non, Jésus n'avait surement pas pu marcher sur l'eau. Ce n'est pas possible, toutes les expériences dans mon bain le prouvaient sans conteste. Bref, fi du bon Dieu, du petit Jésus et de ses miracles...

Petit papa Noël
Dans l'ordre croissant de crédibilité, vient ensuite à mon avis le Père Noël. D'ailleurs il ressemble pas mal aux représentations traditionnelles de Dieu. Et ils partagent plein d'autres caractéristiques : l'omniscience, l'invisibilité, le culte de la personnalité, la récompense des bonnes actions...
Devant mon manque de foi en l'homme rouge et mes questions pressantes, mes parents m'ont assez vite révélé le secret que je pressentais mais m'ont surtout encouragé à le laisser vivre pour que la "féérie magique de Noyel" continue de s'appliquer pour mon petit frère. Et là, on y est allé fort, très fort... Pour contrecarrer l'effet révélateur qu'avaient certaines discussions de récré, j'ai employé sans le savoir les techniques utilisées par les sectes : user et abuser de la confiance que mon petit frère avait en moi pour le persuader que c'était une cabale, destinée à lui faire perdre la foi et donc le bénéfice du Père Noël... Malgré tout, vers 8-9 ans, alors qu'il était franchement sceptique, mes parents devaient employer des trésors d'imagination pour laisser vivre le mythe.

Une année, toute la famille partait quelques jours en vacances avant Noël, pour rentrer après. C'était entendu : si le Père Noël existe, il aurait tout loisir de déposer les cadeaux durant notre absence, le jour de Noël. Sinon, mes parents seraient avec nous et ne pourraient pas garnir nos chaussons sagement alignés pour l'occasion au pied du sapin. Pour plus de sécurité, mon frère insista pour pénétrer en premier dans la maison à notre retour de vacances. Mes parents finirent par obtempérer. Je sentais la catastrophe arriver... Mais les cadeaux étaient là ! La preuve était incontestable, la foi de mon frère était ranimée pour une année entière sans soucis. Moi-même je restais stupéfait ! Comment diable cela était-il possible : nous étions à deux heures de route de là le 25 décembre... Évidemment, ma mère avait profité de "l'oubli de ses clefs" pour placer les cadeaux avant le départ. L'idée qu'on puisse intervenir sous le sapin le 22 décembre nous paraissait tellement saugrenue que nous ne l'avions même pas envisagée.

Une autre fois, ils sont parvenus à dissimuler aux fouilles investigatrices de mon petit frère une table de ping-pong durant plusieurs semaines... Là encore, en jouant sur les tabous implicites : comment aurait-il oser chercher dans le bureau paternel, toujours verrouillé et complètement sanctuarisé ?

Enfin, une année, nous décidâmes de veiller toute la nuit pour surprendre ma mère "la main dans le sac"... Nous nous installâmes dans sa chambre, plus proche du sapin, plus ou moins dissimulés, avec un Walkman et la cassette de l'intégrale des sketches de Coluche pour être certain de se tenir éveillé. La première année, mon frère s'endormit. J'ai croisé maman en pleine nuit, bien attrapée (et un peu atterrée aussi par notre entêtement...) Je pense que c'est la dernière année où mon petit frère a eu la foi. L'année suivante, elle s'est faite attrapée par toute la fratrie et, une fois notre forfait commis, nous fûmes ravis de filer au lit gratter quelques heures de sommeil avant l'ouverture des paquets...

La petite souris
Enfin, l'histoire la plus crédible (et qui arrive aussi plus tard dans l'enfance), et donc la dernière a avoir subi les conséquences de ma sagacité, est la petite souris.
Il faut dire qu'elle rend sympa un moment qui peut parfois être désagréable...
Voila comment cela se passait chez moi : une fois la dent de lait tombée, nous l'emballions dans du papier et nous glissions le tout sous l'oreiller. Et au matin, la dent avait été remplacée par un pièce de un, deux, parfois cinq francs !
J'imaginais que le rongeur utilisait toutes les dents du village pour construire sa maison, potentiellement sous mon lit d'ailleurs...
Je me souviens parfaitement m'être dit qu'il était impossible que mes parents rentrent dans ma chambre durant mon sommeil, n'ouvre le paquet, en retirent la dent, mettent une pièce à la place et replacent le tout sans que je ne m'en aperçoive... Par contre, une souris, pas de soucis, c'est petit et discret. Bon, évidemment, mes parents préparaient un second paquet qu'ils échangeaient simplement avec le premier, ce qui rendait l'exercice beaucoup plus simple. Et je sous-estimais assez largement la lourdeur de mon sommeil.

C'est à présent à mon tour de jouer à la petite souris. Je suis toujours un peu inquiet que les enfants ne se réveillent, surtout l'aîné qui a le sommeil délicat ces temps-ci. Voici quelques astuces que j'ai utilisées pour rendre l'histoire crédible. Un jour, nous avions enfermé la dent dans un tube de plastique particulièrement difficile à ouvrir. J'ai alors simulé une attaque de rongeur : le tube déchiqueté, la dent envolée et une petite pile de pièces à côté, le tout dans un recoin sombre et discret de la chambre... Mon fils prétendra même avoir vu la souris s'échapper, ce qui expliquait qu'elle n'aie pas eu le temps de tout bien ranger.
Une autre fois, alors que je tentais de procéder discrètement à l'échange en pleine nuit, mon fils se réveille et sursaute de me trouver près de lui. Je l'envoie au toilettes, substitue rapidement les deux paquets sous son oreiller et file le rejoindre dans la salle de bains. Et, pendant qu'il restait à demi-endormi sur le trône, je fais mine d'entendre du bruit dans sa chambre. Il entend également, pense de lui-même à la petite souris et file vérifier : la coquine est passée pendant que nous étions absents, elle était même surement déjà cachée dans la chambre quand nous sommes sortis ! On l'a ratée de peu...

Pièges à Schtroumpfs et autres fables familiales
Mon père est taquin. Il a toujours aimé nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Je me souviens comment cela a commencé pour le cas le plus flagrant. Nous étions en voiture et nous posions à nos parents d'innombrables questions, du genre : pourquoi les nuages tiennent en l'air, et pourquoi les poissons peuvent respirer sous l'eau mais pas hors de l'eau ? Quand, passant devant un pylône de ligne à haute tension, nous lui demandâmes ce que c'était... La réponse fut immédiate et d'une sincérité confondante : "ah, ça, ce sont des pièges à Schtroumpfs. Gargamel les a posé ici pour les capturer, regardez bien si vous en voyez coincés dedans..." L'effet fonctionna au delà de ses espérances : non seulement il gagna un peu de tranquillité durant tout le trajet où nous étions occupés à vérifier si Gargamel avait réussi son coup, mais surtout, mon frère y cru longtemps, très longtemps, durant des années.
Il faut dire qu'il était fan des Schtroumpfs. A chaque fois qu'il ramenait un bon bulletin, ou pour son anniversaire ou une fête, il gagnait un album (moi, c'était Tintin...) Et un jour, il prétendit mordicus avoir vu un Schtroumpf pris au piège (on retrouve un peu ce trait de caractère pour les cloches ou la petite souris chez ses neveux et nièces...)

Ce genre d'exemple est légion et ma créativité ou celle de mon père, couplée à la crédulité confiante de mon petit frère nous ont permis de les multiplier. Un dernier pour la route... Un soir où les parents étaient de sortie et nous avaient laissés seuls à la maison (ça arrivait de temps en temps, c'était la grosse fiesta), nous choisîmes de dîner "comme des riches", et nous installâmes chacun à un bout de la table, comme nous avions surement dû le voir dans un film où un couple d'aristo dînait dans une immense salle sombre éclairée au chandelier... Et là, nous découvrîmes certains problèmes logistiques auxquels nous n'avions pas pensé : comment se passer le sel à une telle distance. Nous nous échangeâmes bien l'emballage rond La baleine en le faisant rouler sur la table, mais nous nous rendîmes vite compte que ce ne serait pas possible pour la carafe d'eau ou le plat de raviolis. C'est alors que j'imaginai qu'il pourrait y avoir un petit tapis roulant sous la table, avec laquelle nous pourrions communiquer et que je l'assénais comme une vérité générale : chez les riches, ils ont un tel système pour échanger d'un côté à l'autre de la table. Certains sont mêmes commandés avec des boutons, c'est du dernier chic. Je crois qu'il y a cru pendant des années...

jeudi 24 septembre 2015

Tentative de donation au MOBA

Un de mes objectifs dans la vie est de réaliser une donation (ou une vente, encore mieux) d'un objet à un musée et que celui-ci m'en attribue le crédit. C'est même l'objectif n°7 dans ma liste de choses à faire avant de mourir.

Cette envie remonte au stage d'immersion en entreprise de 3ème durant laquelle j'avais passé une semaine dans le musée d'art et d'archéologie local. Il y avait des petites plaques qui remerciait les donateurs, ou qui disait simplement : "Don de Mme Michu, 14 avril 1922". Presqu'un siècle plus tard, le tableau dont s'était défait la mère Michu était probablement la dernière trace qu'elle avait laissé de son passage sur terre, et c'était quand même la classe, surtout quand la croûte dont elle se débarrassait s'avèrera une génération plus tard être d'un artiste renommé...

J'ai toujours pensé remplir cet objectif grâce à ma collection de monnaies. J'ai de très jolies pièces dont certaines sont connues à très peu d'exemplaires, et qui manquent dans la plupart des plus grandes collections du monde, à commencer par le Cabinet des Monnaies et Médailles en France, le British Museum ou l'American Numismatic Society pour ne citer que les plus fournies. Aucun doute qu'ils seraient ravis d'accueillir ma donation et que mon nom figurerait sur le site Internet à côté d'un scan.

Mais je n'ai pas encore envie de me défaire d'une partie de mes pièces. Et j'ai aussi l'ambition de tenter de les vendre en bloc lorsque ma collection sera la plus belle au monde dans son domaine (oui, rien que ça).

Alors, en attendant, je cherche des alternatives pour remplir cet objectif et, en fouillant un peu sur Internet, j'ai trouvé un musée pour le moins original qui acceptait des contributions à ma portée. Il se trouve à Boston et se nomme Museum of Bad Art. Comme son nom l'indique, le MOBA s'est fait une spécialité de rassembler les croûtes les plus infâmes, principalement comme un témoignage de la branlette intellectuelle dans laquelle se complaît une partie du microcosme des "artistes modernes". Ils ne le tournent pas ainsi mais c'est l'idée.

Et, comme ça tombe bien, lors de nos déménagements successifs, mon épouse s'était résignée à se débarrasser d'une petite création qu'elle avait réalisé (avec talent je trouve) quand elle avait une dizaine d'années. J'ai d'abord tenter de le vendre au prix fort avec un petit baratin, mais comme on peut s'en douter, ça n'a pas fonctionné (*: voire mise à jour à la fin de cet article). Alors je me suis dit que plutôt que de la jeter, j'allais essayer de faire d'une pierre deux coups : réaliser un objectif et faire entrer ma moitié dans la postérité. Je ne pense pas qu'elle sera vexée par le fait que son sens artistique d'enfant soit considéré comme immature et soit moqué par le thème même du musée... Enfin j'espère. De toute façon j'ai le droit : la sculpture est à moi maintenant, elle est passée par la case poubelle et était donc légalement res nullis avant que je ne me l'approprie et qu'elle ne devienne donc ma res propria... Vérifiez vos cours de droit si vous en doutez encore.

Voici donc le mail que j'ai envoyé aujourd'hui à l'adresse indiquée sur le site Internet du MOBA pour les généreuses contributions. C'est en anglais mais au cas où, Google (Traductions) est votre ami.


Dear MOBA curator,

Please find enclosed the picture of a sculpture I would be delighted to offer to the Museum if you think it can find its place in your collection.

This masterpiece come from France and the 'artist' explained its working in those words. Below is a tentative translation in case the French version is not clear. This work is pompously named "Angoisse de la page blanche (1992)" - Anxiety of the white page (1992)

Anne DURAND est une artiste née dans la seconde moitié du XXème siècle, lors d'une interview menée dans son atelier en 2008, l'artiste déclara s'inspirer du surréalisme de Dali et de la ligne claire pronée par Hergé, inspirations que l'on décèle dans l'aspect torturé du mobilier et des murs de la pièce ainsi que dans le dépouillement extrême du décor, qui retranscrit la solitude de l'artiste face à lui-même...

Anne DURAND is a French artist born in the second half of the twentieth century. In an interview conducted in her studio in 2008, the artist declared she was inspired from Dali's surrealism and Hergé's 'clear line' movement. Those inspirations can be detected in the tortured-aspect furniture and romm walls and in the extremely-bare scenery, which transcribes the solitude of the artists facing themselves...

The sculpture is 22 centimers large, 12 centimeters wide and 10 centimeters high and is close to one kilo heavy and is probably in glazed clay.

If you think this wonderful sculpture can join your collection, I will be happy to accomodate for the transportation.

Best regards,


Je mettrai à jour le billet si j'ai une réponse. En attendant, une petite photo. Pas si mal pour une gamine, non ? Et oui, je suis amoureux de ma femme, je la trouve super même quand elle sculpte de la terre de ses petits doigts malhabiles...



(*) : voici donc près de 18 mois plus tard la mise à jour tant attendue. Pas de réponse de la part du MOBA mais, contre toute attente, la sculpture qui végétait sur eBay depuis des années a finalement trouvé preneur ! Après avoir descendu le prix à 10 euros, je me suis dit qu'il fallait pour plus de crédibilité le fixer un peu plus haut, et c'est donc pour la modique somme de 50 euros qu'un acheteur éclairé s'est procuré la toute première œuvre d'une artiste en devenir... Épatant, non ?


mercredi 19 août 2015

Fous-y don' perdre et quelques autres expressions de chez nous

Mon article sur la visite de la grotte des Moidons, réalisée par une guide 100% pur jus d'épicéa Made in Jura comme on dit, m'a donné envie de recenser quelques expressions de patois jurassien, qui fait partie de la famille non pas des langues d'oc, non pas des langues d'oïl, mais de l'arpitan, qu'on appelait il y a peu encore, le franco-provençal pour souligner son caractère hybride entre les deux grandes familles.

Commençons par l'expression éponyme de cet article :

Foutre perdre = jeter, et à la place de dire fous-le perdre ou fous-la perdre, le jurassien aime bien utiliser le pronom passe-partout "y"... Vois-y j'te dis ! Et pour accentuer, un petit donc prononcé avec la couleur locale sera ajouter à la fin... Fous-y don' perdre, j'te dis vendiou !

Quelques arbres vus dans l'article précédent. La pesse et le foyard, habitants du Haut-Jura... Y'a aussi la verne mais je ne suis pas sûr de son nom en français, l'aulne d'après mon ami Google. Tout juste bon à foutre au feu...

Y va faire du temps = une des phrases fétiches du grand-père annonçant pour sûr des orages...

Sourayou = adjectif qualifiant un endroit sinistre, où on ne se sent pas bien. Haha, y'a pas de mot en français pour dire ça, hein ?

Capouiller = rendre trouble (l'eau)... Oh, ces gosses ont encore capouillé toute l'eau de la fontaine avec leur ballon !
Frouiller = Tricher, gruger... Ces deux-là frouillent aux cartes et s'entendent comme deux larrons en foire...

Tomber comme une chougne = il suffit de savoir que la chougne est le mot arpitan pour la bouse de vache, et l'image est frappante (ou éclaboussante au choix). Là encore, mon épouse parisienne m'a avoué avoir surpris une conversation récemment où un enfant tentait d'exprimer cette idée sans succès et a fini par se rabattre sur "il est tombé comme un caca", faute de mieux... Le jurassien démontre une fois de plus son indispensable apport à toute conversation un tantinet relevée.


Et quelques mots en vrac qui semble-t-il ne sont pas français !!
Une rapponse ou un plottet... Tout le monde connaît ça pourtant, non ?

En revanche, une autre expression, employée dans la famille, ne semble pas venir de l'arpitan. Nous utilisons en effet le verbe pinocher. Principalement dans l'expression : Pinoche pas dans le plat.
Pinocher = se servir une bouchée ou deux dans le plat sans faire transiter la nourriture par l'assiette.
Mon ami Google m'apprend que cela vient de l'ancien français et qu'on utilise d'ailleurs plus souvent la forme pignocher. La définition globalement reconnue étant : Manger sans appétit et en ne prenant que de très petits morceaux. L'idée générale est conservée mais chez nous, c'est plus signe de gourmandise que de manque d'appétit...

Enfin, une tournure qui hérisse le poil de mon épouse : "Il va pas faire quoi ? Tu vas pas aller où ?" Pour ceux qui ne comprennent pas, cela signifie : "Mais que peut-il bien faire ?" Sous-entendu : rien. Ou encore "Mais où pourrais-tu bien aller mon pauvre ?" Tournure testée à Paris sans succès, pourtant je peux vous assurer que la question est parfaitement compréhensible partout dans le Jura...

Mise à jour d'avril 2016 : si vous aussi vous souhaitez partager des expressions de votre région, recherchez et remplissez le formulaire de crowdsourcing mis en ligne par l'Université de Strasbourg...

mardi 18 août 2015

Les Grottes des Moidons (39)

Les grottes des Moidons, situées en pleine forêt domaniale du même nom sur la commune de Molain, est la plus grande du Jura.
Pourtant, sa découverte est très tardive : 1966, et les inventeurs ont trouvé sa seule entrée en creusant là où s'échappait un courant d'air froid en été.
Les stalactites et stalagmites y sont très impressionnantes et pourtant elles ne grandissent par concrétion que d'un centimètre par siècle...
Le même phénomène de dépose du calcaire explique la présence de quelques flaques (l'eau s'infiltrant globalement dans le sol perméable), les "gourds"

Autour, un petit parcours forestier nous rappelle comment différentier ormes et hêtres (les "fayards"/"foyards" pour le grand-père) ainsi que les sapins des épicéas (les "pesses" puisque nous en sommes à explorer la variante jurassienne de l'arpitan)... Une astuce parmi d'autres : les épines du sapin sont plates, d'un vert plus tendre en dessous, peu piquantes et disposées en peigne alors que les épines des pesses sont rondes, de couleur uniforme, piquantes et disposées en brosse autour de la branche.

mercredi 29 juillet 2015

Ma vision des réunions : le nouveau système d'évaluation au boulot


Meeting particulièrement inintéressant organisé par les RH (anglo-saxons) du siège européen concernant le nouveau système d'évaluation...


Une heure et demi de perdue (ou presque...) Comme souvent, je m'amuse à noter des choses intéressantes et cette fois-ci, j'ai retenu cinq points qui ont provoqué la jubilation de mes collègues quand je leur en ai fait part à la fin du calvaire :
  • En anglais, une gaussienne, ou courbe de Gauss se dit Bell curve. Pas du nom d'un mathématicien concurrent... Non, juste la forme de la cloche. Classe.
  • Une de nos collègues a baragouiné une question. Incompréhensible. Réaction de la RH : "Sorry ?" La collègue répète. Personne n'entrave que dalle. Poker face de la RH, "Could you please give me an example ?" Magnifique... Presque digne du "c'est pas faux" de Karadoc
  • Ensuite, le RH nous explique "The important is to focus on people who can influence your appraisal"... Regards incrédules.
  • Le bougre insiste et nous explique comment il fayote avec ses direct reports juste avant les entretiens : "I make sure I can invite them to a coffee and make clear what have been my achievements for the last 6 months". Bah au moins c'est clair...
  • Enfin, il n'y avait pas de chaise pour tout le monde, j'ai donc tenté de jouer aux poteaux de Koh-Lanta sur une demi-dalle de moquette. Et bien même sans vague et sans vent et dans un environnement plutôt confortable, au bout d'une heure, ça commence déjà à tirailler sévère...
Vous ne voyez rien concernant le système d'évaluation à proprement parler ? C'est normal, je n'ai noté que les cinq points intéressants...

Réchauffement climatique et hausse du niveau de la mer

Lu au détour d'un article de Sciences & Avenir d'il y a quelques mois, quelques points surprenants, contre-intuitifs mais néanmoins parfaitement logiques sur la relation entre réchauffement climatique et hausse du niveau de la mer.


Demandez à n'importe ce qui expliquerait la hausse du niveau des mers en cas de réchauffement climatique, et peu sont les esprits éclairés qui ne vous répondront pas : à cause de la fonte de la banquise. Je me serais laissé prendre. Et pourtant, comme le note le magazine :
  • La fonte de la banquise ne jouera aucun rôle dans la montée des océans : qu'elles soient sous forme liquide ou solide, ces eaux sont déjà dans la mer... On peut en effet penser que la proportion de matière émergée correspond à la différence de volume entre eau liquide et glace et que donc la fonte de ce volume "supplémentaire" ne se traduit que par une diminution du volume du glaçon qui réintègre exactement l'espace laissé vide par la partie immergée dudit iceberg.
  • L'élévation du niveau des océans sera due à 50 % à la fonte des glaciers d'eau douce. Logique, leur eau est actuellement sur le continent et réintégrera les mers en cas de fonte...
  • Les 50 % restants auraient une origine plus surprenante puisqu'ils seraient dus à la dilatation thermique des eaux maritimes qui gonfleront sous l'effet de l'augmentation de leur température globale... 50 %, c'est pas rien !
Voilà de quoi briller en société la prochaine fois que vous entendrez parler de réfugiés climatiques de certains états polynésiens par exemple...

vendredi 24 juillet 2015

Témoigner en tant qu'expert au tribunal

Ce petit article est plus un pense-bête qu'autre chose, concernant les différentes catégories pour lesquelles il serait envisageable de réaliser un des objectifs d'une vie bien remplie : devenir expert au tribunal.

Dans la famille, nous pourrions je pense concourir pour une des catégories suivantes :
A07 Élevage - apiculture
A11 Pêche, chasse, faune sauvage
B03-13 Numismatique et médailles
D03-02 Marchés financiers et produits dérivés
D03-03 Opération de banque et crédit
D03-04 Opérations d'assurance et gestion des risques
D03-05 Opérations financières internationales

Je crains que les deux premières ne se matérialisent pas, étant donné qu'après en avoir discuté avec papa, il ne semble pas du tout intéressé...

Quant à moi, j'ai raté la deadline cette année, mais je pense que si ça me tient vraiment à coeur, je le ferais l'année prochaine, au moins pour une ou deux catégories dans lesquelles je suis sûr d'être compétent... Ce serait tout de même trop cool d'être appelé à la barre d'un tribunal en tant qu'expert pour aider à la compréhension d'une affaire, non ?




Et comme il s'agit vraiment d'un pense-bête, des infos pertinentes et pratiques glannées sur la toile :

I - PROCEDURE D'INSCRIPTION SUR LES LISTES D'EXPERTS DES COURS D’APPEL

Pour porter le titre d'expert de justice il faut être inscrit sur une liste dressée par la Cour d'appel du lieu où l'on peut exercer ses missions.

Il n'est pas possible d'être inscrit simultanément auprès de plusieurs Cours d'appel.

Pour présenter sa candidature, il faut demander un dossier d'inscription au Procureur de la République dans le ressort duquel se situe sa résidence ou son activité professionnelle. En pratique, il faut s'adresser au Parquet, service des experts.

La procédure d'inscription est soigneusement définie par les textes, et en particulier aux articles 6 et suivants du décret du 31 décembre 1974.

Le dossier doit être remis au plus tard le 1er mars pour les inscriptions à valoir l'année suivante. Compte tenu des diverses pièces qui doivent accompagner ce dossier, il est conseillé de s'en préoccuper suffisamment tôt.

Pièces généralement demandées

Les pièces à fournir varient suivant les Cours d'appel. Les documents suivants peuvent être demandés :

  • Demande d'inscription (imprimé remis par le Parquet). Cette demande reprend en général les différentes rubriques mentionnées dans le décret précité, à savoir :
1 - Indication de la ou des spécialités dans lesquelles l'inscription est demandée,
2 - Indication des titres ou diplômes du demandeur, de ses travaux scientifiques, techniques et professionnels, des différentes fonctions qu'il a remplies et de la nature de toutes les activités professionnelles qu'il exerce avec, le cas échéant, l'indication du nom et de l'adresse de ses employeurs,
3 - Justification de la qualification du demandeur dans sa spécialité,
4 - Le cas échéant, indication de moyens et des installations dont le candidat peut disposer.
  • Extrait d'acte de naissance ou fiche familiale d'état-civil
  • Photographie(s) d'identité
  • Copie des titres et diplômes (avec, parfois, demande de certification conforme)
  • Etat signalétique des services militaires

Par ailleurs, certaines Cours d'appel demandent:
  • un Imprimé de demande de Bulletin numéro un du casier judiciaire (Imprimé fourni par le Parquet. La demande sera effectuée directement par ses soins),
  • un Curriculum vitæ et toutes justifications de qualification, parfois de notoriété, dans la spécialité demandée,
  • la liste des expertises déjà effectuées,
  • un engagement sur l'honneur. Cet engagement est celui de ne pas faire l'objet de l'un des cas empêchant l'inscription.

Enfin certaines juridictions font parfois passer un entretien individuel.

Cas rendant impossible l'inscription

  • condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes moeurs,
  • sanctions disciplinaires ou administratives, destitution, radiation, révocation, retrait d'agrément,
  • faillite personnelle ou sanction prévue au titre IV de la loi du 25 janvier 1985,
  • exercice d'une activité incompatible avec l'indépendance nécessaire à l'exercice des missions,
  • inscription sur une la liste d'une autre Cour d'appel.

Cheminement du dossier

Le dossier de candidature va ensuite suivre un assez long cheminement, passant par trois étapes : une instruction qui s'étend de mars à mai, un examen par les juridictions du premier degré qui court de juin à octobre, et enfin la décision de la Cour d'appel, qui est prise vers la mi-novembre.

La Cour d'appel se prononce au vu de l'avis des assemblées générales du Tribunal de grande instance, du ou des Tribunaux de commerce, du ou des Conseil de prud'homme du ressort.

Parfois, les magistrats sollicitent l'avis de la compagnie d'expert (pluridisciplinaire) près la Cour d'appel ou celui d'une compagnie nationale (monodisciplinaire). La Cour n'est cependant nullement contrainte de suivre cet avis, d'ailleurs non prévu par les textes. Mais la pratique montre que cet avis était écouté avec soin par les magistrats.

La notification du résultat est faite au candidat en fin d'année. Elle n'est pas motivée.

Quels sont les critères de choix des magistrats ?

En l'absence de motivation des décisions, il est bien difficile de répondre. Au vu des pièces demandées, on peut toutefois estimer que les magistrats examinent la compétence, l'expérience, la notoriété, la disponibilité, l'indépendance et les moyens de remplir les missions que présentent les candidats. Notons cependant que l'inscription n'est pas un diplôme supplémentaire, mais une charge, parfois lourde, voire dangereuse dans certaines expertises en matière criminelle. Les candidats ne doivent pas être déçus de ne pas être inscrits dès leur première demande.

Enfin le nombre d'experts retenus tient à des facteurs indépendant des candidats, comme l'évolution du nombre d'expertises, le nombre d'experts dans une discipline, les orientations générales de la Chancellerie ou encore à d'autres facteurs relatifs à l'institution judiciaire. 

Un conseil : après un refus, ne pas hésiter à représenter sa candidature l'année suivante, surtout si l'on peut faire valoir des éléments nouveaux.

L'honorariat

L'admission sur la liste des experts honoraires n'est pas automatique. Les conditions fixées par l'article 33 du décret du 23 décembre 2004 sont les suivantes :

  • avoir 65 ans;
  • avoir figuré pendant quinze ans sur une liste de cour d'appel ou pendant dix ans sur la liste nationale.

II - PROCÉDURE D'INSCRIPTION SUR LES TABLEAUX DES EXPERTS PRÉS LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS ET LES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL


La  procédure  d’inscription sur les tableaux des experts près les tribunaux administratifs et les Cours  Administratives d’Appel, se réfère aux textes suivants du code de justice administrative :

Art R.122-25-1: « Il peut être établi, chaque année, pour l’information des juges, un tableau national des experts près le Conseil d’État dressé par président de la section du contentieux, après consultation des présidents de cour administrative d’appel »
Art R.222-5: « Chaque année, le président procède, s’il y a lieu, à l’établissement du tableau des experts près la juridiction qu’il préside »

Ainsi le code de justice administrative donne la possibilité au président de la section du contentieux du Conseil d’État, de même qu’à chaque président de tribunal administratif ou de cour administrative d’appel, la possibilité de dresser un tableau annuel des experts auprès de sa juridiction.

Pour prendre le cas de l’Ile de France, les candidatures sont à adresser à l’un des deux Présidents de Cour Administrative d’Appel (Paris ou Versailles). Après instruction, les dossiers de candidatures sont examinés par une Commission semestrielle co-présidée par les deux Présidents de Cour qui prennent la décision de retenir ou non le candidat. Ils adressent ensuite un courrier à chaque candidat pour l’informer de leur décision.
À ce jour,  les Présidents des Cours Administratives d’Appel de Paris et de Versailles ont décidé depuis l’année 2004 de disposer d’une liste commune d’experts.

                                                                                                      Source : www.cnejita.org
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samedi 18 juillet 2015

Contrôler ses rêves : la première étape

La première étape pour contrôler ses rêves est de parvenir à prendre conscience qu'on est en train de rêver et de faire en sorte que ça n'interrompe pas le cours du rêve.

Cela nous est sans doute tous déjà arrivé de manière involontaire, mais le but est évidemment de parvenir à le faire de plus en plus souvent et consciemment.

Et l'étape préliminaire à cette prise de conscience généralisée, c'est de parvenir à se souvenir de ses rêves. Pour cela, rien de mieux que de les écrire au réveil. C'est ce que je me propose de faire dans cet article... Bon, comme c'est tout de même assez intime et qu'il y a tout un contexte que je n'ai pas spécialement envie de raconter, je n'expliquerai pas les rêves, ça risque donc de ne pas être spécialement intéressant pour toi, lecteur inconnu. Mais pour toi, lecteur qui est mon moi du futur, ça restera cool, donc profite !

Nuit du 17 juillet - 11 heures de sommeil

Je suis avec les enfants et mon épouse dans la tour de mon ancien employeur. Nous attendons l'ascenseur pour monter à mon ancien étage. Les ascenseurs ne sont pas les bons mais ça ne me choque pas, ils ressemblent plus à une batterie que j'ai vu la semaine dernière à Rotterdam. Nous en laissons partir un qui est plein et attendons le deuxième. Une queue se forme progressivement devant un mais je conseille à ma chérie d'en choisir un autre qui semble plus proche. Il arrive, nous montons à plusieurs. Je suis à l'emplacement de mon ancien bureau, ma famille a disparu mais je ne m'en inquiète pas.

Comme dans la réalité, le service a déménagé. Les tables, chaises, ordinateurs branchés sur Reuters sont toujours là, ce qui m'étonne, mais tout le reste a disparu. Un type d'une cinquantaine d'année, habillé en gardien, est assis au milieu, dos à la fenêtre. Nous avons une longue discussion, je lui explique comment c'était avant, il me parle du quartier et des nombreuses résidences qui sont dans le coin. Je finis par comprendre que ce lieu est une espèce d'annexe des résidences étudiantes/touristiques des alentours. Je fais le lien avec les résidences des deux premiers étages, qui n'existent pas en vrai mais je confonds avec l'internat à Lyon semble-t-il, et il semble que les services connexes de l'étage soient aussi annexés. Quand la conversation s'épuise, un groupe de touristes japonais débarque. Ils accaparent le gardien et je m'en vais.

Devant la batterie d'ascenseurs, je croise B* B*, la responsable des services voisins du mien. Nous avons fait la même école (avec une trentaine d'années d'écart certes) et elle semble ravie de me recroiser. Nous nous faisons la bise, ce qui n'est jamais arrivé en vrai mais ça me semble naturel dans le rêve, et nous marchons ensemble dehors. Nous parlons d'abord d'une rencontre de l'association des anciens élèves. Pendant ce temps, je prépare ma position si jamais nous discutons de mon licenciement. Je décide d'avoir une ligne assez claire et de lui dire que je ne peux pas spécialement lui parler de la procédure en cours étant donné qu'elle est impliquée puisque je sais qu'elle a participé à une réunion le week-end durant laquelle il a été décidé de me virer. J'espère bien en apprendre plus sur cette réunion par ce biais... Malheureusement, même si je sais que la conversation va finir par dériver là-dessus, elle parle d'autre chose et croise un couple de personnes qu'elle salue et avec lesquelles elle parle un petit moment... C'est l'heure du réveil déclenché par l'appel de mon jeune fils.

Prise de conscience : aucune, malgré quelques indices d'incohérence flagrante. Le seul petit point est peut-être cet aparté que je fais avec moi-même pour anticiper ce que je vais dire tout en sachant que nous allons finalement en parler. Maigre butin !

vendredi 26 juin 2015

Les chips du 29 MAR 87

Une des activités que je préférais quand j'étais petit, c'était d'aller fouiller les décharges publiques avec mon père. On appelait ça "faire les poubelles".

A l'époque, chaque commune possédait sa décharge, souvent un bord de falaise ou un trou dans lequel les habitants venaient benner tout ce qu'ils apportent aujourd'hui à la déchetterie... On y trouvait des trésors. Et pas seulement pour mes yeux d'enfants. Nous ne rentrions jamais bredouille, toujours des objets et appareils parfaitement fonctionnels, à utiliser ou à revendre sur les brocantes, de nouveaux jouets presque neufs et bien sûr pléthore de métaux que nous revendions au ferrailleur...

Et pendant quelques années exista une décharge bien particulière qui était dédiée plus particulièrement à tous les invendus alimentaires des grandes surfaces des environs. L'ambiance y était différente et on n'avait ici que quelques minutes pour fouiller les chargements déchargés par les camions avant que les bulldozers ne les enfouissent afin d'éviter une prolifération de nuisibles qui auraient immanquablement été attirés par une telle manne de nourriture. C'était beaucoup moins pratique pour un enfant de moins de 10 ans : non pas qu'il y ait un grand danger mais il fallait être rapide, se frayer un chemin parmi les autres amateurs de nourriture gratuite, souvent des manouches pas toujours très affables et j'imagine que j'aurais alors été plus un poids qu'autre chose, si bien que je n'y accompagnai mon père qu'une ou deux fois...

Parmi les centaines de kilos de victuailles parfaitement comestibles qu'il rapporta à la maison (fruits et légumes légèrement tallés, conserves cabossées ou à l'étiquette abimée, packs de yaourts dont un était percé, paquets de gâteaux proches de la date de péremption...) se trouva un jour un énorme carton rempli de sachets de chips en portion individuelle se périmant le jour de mon anniversaire.

J'adorais ces chips, principalement pour cette raison, elles étaient trop cool à arborer fièrement la date du 29 MAR 87. Et puis nous ne les consommions jamais à la maison par exemple où maman achetait des sachets plus grands. Nous ne les mangions donc qu'à l'occasion de sorties scolaires et de pique-niques, autant dire pas souvent... A ce rythme, je pense que le stock dura presque dix ans et je me souviens avoir ouvert le dernier paquet avec un brin d'émotion, probablement autour de 1995... Elles étaient toujours bonnes, cela faisait bien quelques années qu'elles avaient perdu leur craquant mais franchement, pas de raison de les jeter.

Et puis, le monde évoluant comme il évolue, des normes de sécurité se sont invitées, la décharge a été fermée au public pour des raisons "d'hygiène et sécurité"... Et oui, les gens sont des irresponsables incapables d'assumer leurs actes c'est bien connu. Alors un technocrate quelconque s'est dit un jour qu'il ne voulait pas prendre le risque de voir un scandale le rattraper si quelqu'un s'intoxiquait avec ce qu'il avait ramassé là-bas, ou même se faisait écraser par un bulldozer parce qu'il a voulu rattraper une boîte de sauce tomate. Oui, les joies de la judiciarisation de notre société... Il faudrait que je mette un mot sur ce phénomène dans mon article sur ce que j'aime/n'aime pas.
Au final, depuis, les invendus sont largement détruits au lieu de profiter aux récupérateurs. Et ça arrange sans doute de quelconques lobbies qui ont surement fait voter ces lois, même si la tendance actuelle est de nouveau à la récupération par des associations, etc.

Bref, trêve de considérations politico-philosophiques. Je terminerai plutôt en disant que j'y pense encore, de temps en temps, et particulièrement quand mes collègues s'inquiètent de voir la DLC de leur compote ou de leur yaourt dépassée de deux jours... Dans la cuisine, baignant dans les conversations superficielles qui s'en suivent immanquablement, je souris doucement en imaginant leur tête s'ils avaient goûté mes petites chips du 29 mars périmées depuis 8 ans qui m'évoquaient un anniversaire trop lointain pour que je n'en garde aucun autre souvenir...

vendredi 19 juin 2015

La gloire de mon père

En voyageant intérieurement dans mon passé et mes souvenirs, je me suis rappelé d'un moment pittoresque que je m'en vais vous conter.

J'avais huit ou neuf ans et, comme chaque année, les deux classes (SE+CP+CE1 - CE2+CM1+CM2) qui composaient l'école primaire où je suivais mon cours moyen participaient à une réunion sportive et festive entre les différentes écoles communales du canton.

Cette sortie annuelle était un véritable évènement dans ma vie d'enfant : la journée commencerait par une longue marche (4 km quand même) pour nous rendre sur la grande esplanade qui servait de stade aux 5 ou 6 écoles présentes. Puis on s'affronterait dans tout un tas d'épreuves d'adresse ou de vitesse, on mangerait un pique-nique soigneusement rangé dans notre petit sac à dos. Je pouvais être sûr d'avoir un paquet individuel de chips se périmant le jour de mon anniversaire (on en parle ici) que j'adorais... Et la journée se terminerait par divers ateliers autour des instituteurs : histoires, travaux manuels ou encore chansons accompagnées de la guitare de ce maître à qui il manquait un doigt... Enfin, ce serait le retour, long et épuisant et la longue queue devant le robinet de la cour de l'école pour nous désaltérer après un tel effort... Un peu angoissante parce que je ne savais pas très bien boire au robinet et qu'il y avait un vrai risque de se retrouver complètement trempé (gaugé en VO).

Mais cette année-là, un autre évènement a rendu cette sortie encore plus inoubliable. Nous étions à la fin des années 80, en pleine épidémie de rage dans l'est de la France et, sans parler de psychose, une certaine prudence s'imposait en cas de balade dans la nature. Or, sur le trajet de notre groupe en direction des olympiades se trouvait un petit bois qu'habitaient notamment des blaireaux et des renards, potentiellement infectés par le virus et menaçant pour un groupe d'enfants sans défense. Notre instituteur appliqua donc un principe de précaution (ou les recommandations de l'académie ?) et demanda à mon père, le garde-chasse du secteur, de bien vouloir nous escorter dans la traversée redoutée.

Alors que nous sortions du lotissement et progressions joyeusement sur le chemin de terre qui grimpait jusqu'au fameux petit bois, sous le soleil de juin, nous commençâmes à l'apercevoir au loin. Peu à peu se dessinait sa silhouette rassurante. Il était équipé de tous les accessoires qui firent immédiatement forte impression à tous mes camarades : un képi, des rangers, un uniforme vert sur lequel la plaque traditionnelle des gardes-chasse était accrochée et surtout, bien sûr, un ceinturon supportant le 357 Magnum de service qui assurait notre protection contre l'infection de la rage... Et ouais, c'était mon papa, nous n'avions rien à craindre, c'était lui le meilleur tireur de tout le département !

Malheureusement, comme on pourra s'en douter, aucune horde de renards ne nous attaqua durant la centaine de mètres de notre bruyant périple en sous-bois, et ma fierté déjà exacerbée ne put s'enorgueillir d'avantage de la démonstration de puissance du 357, dont la moindre détonation aurait arraché des cris à toutes les filles et fait naître des vocations parmi tous mes copains...

Même notre maître nous semblait respectueux devant le déploiement des signes de l'autorité régalienne ainsi mobilisées pour notre sécurité... Durant ma petite enfance, c'est sans doute le moment où j'ai ressenti le plus d'orgueil grâce à la profession de mon père, et de joie de pouvoir partager ce qui était mon quotidien mais paraissait extraordinaire aux yeux de tous. J'ai bien parlé ici d'orgueil et pas de fierté, car il y a de très nombreuses autres occasions où j'ai été fier de mes parents, grâce à leurs actes ou à leurs comportements exemplaires. Ici, honnêtement, la mission du garde n'était pas des plus périlleuses et il a eu bien d'autres occasions d'illustrer son courage et ses talents, mais l'effet suscité sur ce public si proche de moi et si important à mes yeux d'enfants m'a vraiment permis de ressentir un sentiment très comparable à celui que Marcel Pagnol décrit dans "La Gloire de mon Père"...

vendredi 12 juin 2015

Quelques pensées sur l'Eurovision

Il m'est arrivé de regarder le grand concours de la chanson européenne... L'Eurovision ! Déjà dans ma jeunesse, le côté kitsch de cette manifestation me plaisait beaucoup. Et puis la musique de l'hymne européen, mythique...

Malheureusement, le système de vote est un peu problématique ce qui provoque de flagrantes injustices quand vient le moment de désigner les lauréats. En effet, si le fait que chaque pays participant soit également pondéré est à la rigueur défendable, un problème qui ressort souvent est le poids des diasporas et autres affinités géographiques dans la répartition des voix : au moment des décomptes, je bluffe systématiquement mon entourage en prévoyant, ô surprise, que l'Estonie va placer la Russie en première position ou que la chanson turque sera sur le podium allemand...

Un autre aspect que je trouve dommage, c'est que pour s'attirer les faveurs du plus grand nombre, de nombreux pays choisissent une certaine standardisation, par l'emploi presque systématique de l'anglais par exemple, ou le recours à des shows de plus en plus exubérants, reléguant la performance musicale au second plan.

Récemment, j'ai revu des images des concours originaux de l'Eurovision, dans les années 50-60. Un seul orchestre, un seul micro, les mêmes conditions pour tout le monde. Un peu comme les épreuves de voile olympique où les bateaux sont tous identiques. Une chanson et on vote, point. Je pense que pour l'intérêt du concours, on devrait revenir à un modèle de ce genre. Et si on pouvait en plus remettre tout le monde sur un pied d'égalité en rendant obligatoire l'emploi de sa langue nationale, ce serait idéal. Évidemment, les britanniques sembleraient avantagés, mais bon, comme personne en Europe ne peut les sentir, l'utilisation de l'anglais ne serait qu'une maigre compensation d'un handicap bien plus important...

J'aimerais terminer ces petites pensées en revenant sur le concours de 2009. Cette année-là, la France, lassée de connaître des résultats désastreux, fit appel à la chanteuse la plus reconnue à l'international et particulièrement en Russie où était organisé le concours. Une star, une diva : Patricia Kaas. Adorée dans toute l'Europe de l'Est, considérée en Allemagne comme une enfant du pays, Patricia avait toute les chances de l'emporter face à des concurrents évidemment beaucoup moins connus qu'elle.
Mais là, alors que tout semblait sourire, est intervenue une décision parfaitement incompréhensible, inexplicable : le choix de la chanson : "Et s'il fallait le faire". Certes, on pourra argumenter que cette chanson avait été plébiscitée par les internautes pour être en première position de son album, mais franchement, je pense qu'on ne pouvait en trouver de plus inadaptée pour le concours de l'Eurovision : c'est une chanson très lente, triste et surtout qui ne permet pas à Patricia Kaas d'exprimer pleinement son talent et de mettre en évidence sa voix extraordinaire... Et puis la mise en scène minimaliste, Patricia seule en noire devant un micro fixe quand on sait la bête de scène en laquelle elle peut se transformer... C'était tellement triste et frustrant de sentir le public qui avait envie de s'enflammer mais qui n'en a pas eu l'opportunité. Quel gâchis...

Et malgré tout, Patricia a réussi à finir 8ème, le meilleur classement depuis très longtemps, avec des votes positifs reçus de la part de 25 pays et une deuxième place pour les Russes... Avec une chanson plus entraînante et permettant à Patricia de libérer sa voix, c'était le podium assuré...

mercredi 27 mai 2015

Isabelle Kocher aux Matins HEC

Petite prise de note à propos de l'intervention, tôt ce matin, de celle qui devrait bientôt devenir PDG d'Engie.

  • Il y a trop de liquidités dans le marché qui génèrent des bulles
  • "Le siège social d'Engie est en France et va y rester" (bon, ça on s'en fout un peu, mais je pourrai le ressortir si jamais ils délocalisent dans les deux-trois ans)
  • Une formule qui a bien marché : alors que le groupe passaient des provisions/dépréciations exceptionnelles (impairments) de 15 GEUR, l'équipe dirigeante avait déclaré : "nous avons déprécié le monde ancien..." Comme quoi, la finance peut aussi être marketing !
  • Une idée forte sur l'avenir de l'énergie : on va vers la décentralisation des réseaux, avec l'émergence de petites structures, autonomes grâce aux énergies renouvelables (surtout solaire en lequel elle croit beaucoup) et même l'intégration de la production d'énergie aux objets avec les nouvelles technologies qui permettent de fabriquer des capteurs miniaturisés et sans silicium. L'Inde, qui doute de sa capacité à créer de grands réseaux centralisés, parle de "prosumers" pour qualifier ces producteurs-consommateurs d'énergie, et on assiste en Afrique à une révolution similaire à celle des télécoms où le mobile s'est imposé sans passer par l'étape de mise en place de réseaux fixes et coûteux.
  • Cette révolution ne peut se faire sans la capacité d'innovation des start-ups. Mais, plutôt que d'essayer de les concurrencer, Engie sait que les grands groupes sont incontournables et ils investissent quand nécessaire, principalement dans les énergies considérées comme cruciales et qu'ils ne trouveront pas en mode ouvert.
  • Les centrales au gaz non fermées sont mises en sommeil. C'est un enjeu important car ce sont les seules capables de redémarrer presque instantanément (1/4 h) contrairement aux autres centrales thermiques et nucléaires.
  • Un bon manager doit avant tout développer les personnes car il faut, telle une image fractale, que tous les niveaux de l'organisation s'approprient la stratégie de l'entreprise et aient la capacité de s'adapter rapidement aux signaux faibles reçus localement. L'autre qualité important est d'ailleurs la faculté à analyser et comprendre ces signaux.
  • La tonne de carbone coûte aujourd'hui 5€ en Europe, il faudrait arriver à 30-40 € pour que cela commence à avoir un impact, avec un prix mondial qu'elle appelle de ses vœux. Après, il faut avouer que je n'ai pas saisi tous les enjeux stratégiques vitaux derrière ce dernier point, mais c'est pour ça qu'elle est (bientôt) PdG et que moi je ne suis qu'un auditeur à l'affût des miettes de connaissance et de sagesse qu'elle veut bien partager...

samedi 16 mai 2015

Le perce-oreille

Au détour d'un zapping, Karambolage sur Arte. J'aime bien Karambolage, c'est marrant cette manière de comparer deux cultures, ça mériterait d'être produit pour plus de couples de pays... Mais bon, j'imagine que si ça marchait ça aurait été fait, donc ça ne doit surement pas faire un carton.

Bref, dans l'émission en question, l'étude d'un mot, allemand cette fois, Ohrwurm.C'est un mot qui désigne cette petite bestiole qui ressemble à un gros cloportre jaunâtre avec un pince à l'extrémité de l'abdomen : le perce-oreille.

Si ce mot était mis à l'honneur, c'est d'abord parce que c'est ainsi que nos voisins désignent une chanson qui reste de façon entêtante dans notre esprit durant plusieurs heures, voir des jours entiers. Pas vraiment d'expression en français pour traduire ce phénomène courant... Je tenterais "rengaine entêtante" sans grande conviction.

Mais ce qui m'a intéressé, c'est l'explication étymologique du nom perce-oreille (et en allemand, littéralement "vers d'oreille"). D'abord, notons que dans toutes les cultures et toutes les appellations régionales par exemple, la notion d'oreille revient, pas forcément le fait de percer ou de pincer... Ainsi, le nom latin, forticula auricularia y fait également référence. Arte l'explique par le fait que dès l'Antiquité, on le réduisait en poudre pour en faire un médicament contre certains maux d'oreille. La notion d'oreille serait ainsi apparu dans le nom de la bête avant que l'usage médical ne tombe en désuétude...

La croyance populaire a alors inventé une explication pour expliquer le nom de la bestiole. En vrac : cet animal qui aime se cacher durant le jour dans toute sorte de trous pourrait rentrer dans les oreilles des dormeurs et causer des lésions à leur oreille interne (ou même pour les allemands pénétrer dans le cerveau pour y causer des troubles, d'où l'analogie avec la rengaine entêtante). Il peut également être accusé de percer les oreilles avec ses pinces qui peuvent vaguement faire penser à celles utilisées pour ouvrir la voie aux piercings. Ou même de manière un peu plus élaborée, vu sur Wikipédia, son nom viendrait du fait qu'on les retrouve souvent au cœur des fruits à noyaux très mûrs et, sachant que les quartiers d'abricot et de pêche sont appelés des oreilles ou des oreillons, le nom de perce-oreilles serait ainsi resté...

Je peux aisément comprendre comment ce genre de légendes idiotes peut se propager. Suite aux explications de ma mère, enfant, je croyais que ces insectes étaient obnubilés par l'idée de nous trouer les oreilles et mon frère et moi étions très effrayés par cette éventualité. Je me souviens même avoir raconté que j'en avais vu un sur l'épaule de mon frère, pince dressée vers le lobe de son oreille, prêt à s'y accrocher avec vigueur. Le pire est que j'ai encore l'image en tête de cette scène, que j'ai sans aucun doute inventé de toute pièce !

jeudi 26 mars 2015

Le radeau de la Méduse

Le Radeau de la Méduse est l'oeuvre la plus célèbre de Théodore Géricault (et non pas Jéricho comme je le croyais étant jeune, rien à voir avec la ville donc...)

Cette peinture est tirée d'un fait réel : la Méduse, partie avec 3 autres navires en 1816 pour reprendre le contrôle de la colonie française du Sénégal, libérée par les Anglais qui l'occupèrent durant le Premier Empire. Commandé par un noble qui n'a plus navigué depuis la Révolution, la Méduse s'échoue sur un banc de sable pourtant connu au large du Sénégal. On décide alors de construire un radeau de 20 mètres par 7 pour décharger le matériel et alléger le navire, mais alors que le bâteau s'enfonce et que le temps se gâte, l'évacuation est décidée. La plupart des notables s'enfuient sur les chaloupes de sauvetage et 151 malchanceux se retrouvent sur le radeau qui dérive pendant 13 jours.

Le reportage d'Arte suit des membres du Musée de la Marine de Rochefort qui ont décidé de reconstituer ce radeau. Ils comprennent ainsi comment il a été conçu et se rendent compte de sa flottaison très moyenne et des conditions de survie extrêmes : pas de vivres, du vin, l'impossibilité de se tenir ou de s'assoir... Cela explique le bilan catastrophique : 7 survivants...

Géricault a créé ce tableau monumental à l'occasion d'une exposition durant lequel il a fait scandale. Il s'est beaucoup documenté, à la fois sur le fait divers terrible (en rencontrant deux survivants et en reconstituant un modèle réduit du radeau) ainsi que sur la représentation des mourants (fréquentation des morgues, obtention de morceaux de cadavres...)

Les raisons du scandale sont multiples :
  • L'incident était encore très récent et la responsabilité du capitaine évidente. Il était noble et intouchable, mais la révolution était passée par là et les mentalités avaient évoluées. Le titre fut d'ailleurs censuré en "Scène de naufrage"
  • Le message politique est très présent : un métisse est le "héros" de l’œuvre et la fraternisation entre un noir et un blanc est un sujet polémique.
  • La scène sous-entend un certain nombre de comportements "indignes" : cannibalisme (un cadavre est amputé), luttes (du sang sur le radeau), crises d'ébriété ou de folie...
Enfin, dans le reportage, le tableau m'est apparu très beau et plein de sens alors qu'il ne m'avait jamais spécialement emballé sur place au Louvre. La raison en est sans doute qu'il est extrêmement sombre dans le musée à cause d'un des produits utilisé par Géricault, les représentations qui l'éclaircissent en révèlent tous les détails (comme la minuscule voile de l'Argus qui vient au secours des naufragés) et la beauté originelle...

mercredi 11 mars 2015

Soigner par le jeûne

Un petit replay d'Arte concernant un documentaire incroyable.

En Russie Soviétique, des tonnes d'études sur les vertus thérapeutiques du jeûne ont été dissimulées pendant près d'un demi-siècle et non reproduites en Occident (il semblerait que le fait que les études soient financées par les laboratoires pharmaceutiques et que le jeûne soit difficile à vendre en comprimé y soit pour quelque chose...) Là-bas pourtant, une clinique continue d'appliquer cette méthode pour soigner tout un tas de pathologies.

Voyant cela, je me suis dit que ce qui était appelé "jeûne" était une variante du carême ou du ramadan. Mais en fait, il s'agit d'un vrai jeûne, genre grève de la faim, où les patients passent une, deux, trois semaines à ne boire que de l'eau ! Et ils ont l'air en forme en plus... Ils font de l'exercice, beaucoup de bains, de massages... Bref, ils éliminent, et pas qu'un peu.

Radical contre le diabète et le cholestérol mais aussi contre beaucoup d'autres infections, comme les troubles du comportement ou du sommeil par exemple (assez logique en fait : prenez de l'anxiété par exemple, des pensées qui se bousculent dans la tête, de la nervosité continue... Vous coupez la source d'énergie, le corps se concentre sur l'essentiel, la survie et élimine tout seul ces comportements parasites...) Autre piste d'explication : au bout de deux-trois jours (on y reviendra), les cellules se mettent en mode "survie" et sont plus résistantes, notamment contre les effets de la chimiothérapie par exemple. Des expériences sur des souris donnent des résultats saisissants...

Pourquoi deux-trois jours ? C'est le seuil de l'"acidose", le moment où le corps, après avoir tenu 24 heures à griller ses réserves de glucides et de glycérol, puis avoir tapé dans les protéines facilement dégradables, se rend compte que cette pénurie d'énergie va durer un peu et qu'il se met à fortement cramer des graisses qu'il transforme dans un substitut de glucose qui est plus acide...

Le plus dur n'est donc pas la privation de nourriture qui finit par ne plus se faire sentir (honnêtement ça me paraît fou mais bon, il semblerait que le jeûne total, contrairement aux diètes restrictives, génère rapidement une diminution de l'appétit, en 3-4 jours max), mais plutôt dans cette cette crise d’acidose, qui apparaît après 2-3 jours et qui cause généralement une aggravation des symptômes soignées, ainsi que des nausées, maux de tête, douleurs abdominales, crampes, faiblesse générale... Heureusement, cette période ne dure que 24-36 heures avant que le corps ne retrouve un nouvel équilibre.

Et quel est cet équilibre ? Un état proche de celui du manchot (champion du jeûne, jusqu'à 100 jours sans toucher un bout d'anchois) où le corps se nourrit presque exclusivement (à 96 %) des réserves de graisses... Bon pour le régime, non ?

On estime qu'un homme de corpulence normale peut tenir jusqu'à 40 jours sur ses réserves de graisse, avant de commencer à cramer toutes ses protéines, dont le cœur... Pas glop.

Enfin, un point important, dans les deux cliniques visitées (une autre en Allemagne), le suivi médical est très impressionnant. En effet, il convient de contrôler et d'éviter toute carence, de contrôler le pH du sang, car tous ces facteurs peuvent générer des troubles irréversibles s'ils ne sont pas correctement corrigés... A ne pas reproduire seul à la maison avec ses verres d'eau donc. Mais je me demande si je vais pas mettre "jeûner deux semaines" dans ma liste de 100 choses à faire, je suis sûr que c'est une expérience mystique digne d'une retraite dans un monastère bouddhiste...

PS : en faisant quelques recherches, on trouve un article de 2012 écrit par Cécile Aubert traitant du même sujet et sans doute mieux écrit, je le copie donc ci-dessous :
http://www.slate.fr/story/54839/jeune-nourriture-corps-sante

Et... Bon appétit bien sûr !


Jeûne: comment le corps réagit-il à la privation de nourriture?


Le jeûne est la mode: la faculté dit «oui mais». C'est qu'à ne plus manger du tout, on meurt.
Quelles sont les étapes que le corps franchit si on le prive de nourriture? Quand on ne mange plus, les vitamines baissent mais ce ne sont pas des pertes critiques. Après 24 heures de jeûne, les stocks de glucose (glycogen) sont épuisés. Puis, pendant les dix jours qui suivent, l’organisme s’attaque à ses réserves protéiques, issues prioritairement des muscles. Enfin, pour économiser ses protéines, il va puiser dans ses lipides.
A noter que cette phase peut atteindre 100 jours chez les manchots, donc presque quatre mois. Certes, l’homme n’est pas un manchot. Mais l’on sait bien que selon certains scientifiques, hommes et animaux connaissent quelques similitudes. En effet, un adulte d’1m70 et 70 kg compte 15 kg de réserves de graisse, donc il pourrait tenir 40 jours sans manger.
«L’avis de ces biologistes qui étudient les pingouins, précise le Dr Dimitrios Samaras, chef de clinique à l’Unité nutrition des HUG, c’est que le jeûne n’est pas dangereux. Mais qu’au contraire, c’est un événement auquel les animaux ont dû s’adapter avec le temps. Ils affirment également que dans l’évolution de l’être humain, la survie dans la nature a toujours rimé avec de périodes de jeûne plus ou moins prolongées, et que si notre espèce à pu survivre dans le temps, c’est parce qu’elle a pu développer des mécanismes adaptatifs pour les périodes sans nourriture.»
Mais revenons à nos étapes. Pour pallier le glucose manquant, le corps fabrique un substitut, grâce aux protéines et aux lipides : les corps cétoniques, appelés aussi le carburant du jeûne. Et à cause de ce changement de mode d’alimentation, le taux d’acidité dans le sang augmente. Le corps doit apprendre à vivre de ses réserves, l’organisme doit s’habituer. Selon les adeptes de la diète, le plus dur ce n’est pas la sensation de faim, qui disparaît peu à peu, mais cette crise d’acidose, qui peut causer nausées, maux de tête, douleurs abdominales, crampes et faiblesse générale.

Comment le jeûne agit-il sur la santé?

Là, c’est un peu plus mystérieux, et plusieurs médecins avouent ne pas comprendre très bien l’effet du jeûne sur certaines affections. On pense que jeûner provoque un stress et relance les mécanismes d’autorégulation du corps, ce qui aurait des effets thérapeutiques. Le jeûne aiguiserait également les forces curatives de l’organisme et agirait en stimulant les organes d’élimination. On pense aussi que les hormones mobiliseraient les réserves du corps et auraient un effet anti-inflammatoire. Des études allemandes sont en cours sur les mécanismes reliant privation de nourriture et maladies comme le diabète, l’hypertension ou le rhumatisme.
Les adversaires du jeûne thérapeutique insistent, eux, sur le danger de trop puiser dans les protéines, donc dans les muscles. Et d’autres avertissent que jeûner de manière extrême peut modifier le fonctionnement du cerveau et affaiblir la capacité de jugement d’une personne.
«Quand on s’interroge sur le rôle du jeûne dans la maladie, il faut se souvenir qu’avoir un frigo bien rempli est une habitude tout à fait récente dans l’histoire de l’humanité et a peu participé à la pérennisation de l’espèce humaine, relève le Dr Dimitrios Samaras. A quel degré notre organisme supporte-t-il mieux la carence de nourriture que son excès, c’est une question complexe. La nature nous a peut-être doté de mécanismes pour supporter la famine, mais elle n’a pas prévu qu’on vive jusqu’à l’âge de 90 ans et qu’on ait ainsi le temps de développer toutes les maladies chroniques (maladies cardiovasculaires, diabète, cancer, etc.) qui frappent actuellement les sociétés des pays développés. Je dirais que ces mécanismes ont peut-être bien marché pendant le laps de temps que la nature nous octroie pour procréer, mais est-ce qu’ils sont toujours bénéfiques dans le monde actuel ?»

Jeûne et psychisme

Et le psychisme, comment s’adapte-t-il au jeûne? «Contrairement aux diètes restrictives, où la faim persiste et des symptômes tels qu’apathie, fatigue et irritabilité sont au premier plan, le jeûne total se traduit plutôt par une perte d’appétit dans les premiers un à quatre jours, à cause de l’augmentation progressive des corps cétoniques, explique le Dr Samaras. Et une sensation de bien-être est très souvent rapportée par les patients. Le mécanisme sous-jacent n’est pas très clair. Selon certains, cette sensation pourrait être due à l’acide acétoacétique (un type de corps cétonique) qui a un effet sur le cerveau semblable à celui de l’alcool. D’autres mettent en avant plutôt la sécrétion par le corps lui-même de substances identiques à la morphine. Un effet placebo ou l’effet euphorisant de la perte pondérale, surtout pour les patients en surpoids, est également possible.»
Quoi qu’il en soit, le fait est que deux tiers des patients qui jeûnent disent se sentir mieux. «En résumé, conclut le spécialiste de la nutrition, le jeûne est une pratique utilisée depuis la nuit des temps. Son effet de bien-être pourrait expliquer en partie le rôle du jeûne dans des rituels spirituels ou des pratiques religieuses à travers les siècles. Ses effets potentiellement favorables sur la santé de l’individu ont commencé à être explorés depuis environ 150 ans mais la littérature sur le jeûne thérapeutique de l’homme est relativement limitée et loin d’être concluante. En plus, les complications d’une telle épreuve n’étant pas négligeables, la décision ne devrait pas être prise à la légère, ni avant de s’être assuré d’un suivi médical.»

Cécile Aubert

mercredi 4 mars 2015

La musique

Petit, je n'écoutais pas de musique. Au collège, au lycée, c'était un sujet de conversation récurrent, un ice breaker évident et un facteur de cohésion sociale. Je n'avais aucune culture, aucun goût précis, aucun attrait.

Aujourd'hui, sans être un inconditionnel loin de là, j'ai toujours je pense des goûts parfaitement éclectiques mais certains morceaux quasi magiques ont le pouvoir de me booster. Ci-dessous, la playlist ultime qui déchire :
  1. The Cranberries - Salvation
  2. Lady Gaga - Poker Face
  3. Gigi D' Agostino - Blablabla
  4. Demon vs Heartbreaker - You are my high
  5. Modjo - Lady
  6. The Black Eyed Peas - Pump It
  7. Mika - Grace Kelly
  8. David Guetta feat. Akon - Sexy Bitch
  9. Bérurier Noir - Salut a Toi
  10. Alex Gaudino Feat. Christal Waters - Destination Calabria
  11. Benny Benassi - 'Satisfaction'
  12. The Offspring - Self Esteem
  13. Daft Punk - Da Funk
  14. Dr Alban - Sing Hallelujah
  15. The Pointer Sisters - I'm So Excited
  16. Bee Gees - Staying alive
  17. Bonnie Tyler - I need a hero
  18. LMFAO - I'm sexy and you know it
  19. ATC - All Around The World
  20. Gregroire - Toi plus moi
  21. Mickey 3d - Matador
  22. Stardust - The music sounds better with you
  23. David Guetta - Love Is Gone
  24. C2C - Down the road
  25. Carly Rae Jepsen - Call Me Maybe
  26. Les Inconnus - Vice et versa
  27. The Supermen Lovers (feat. Mani Hoffman) - Starlight
  28. Boney M - Daddy Cool
  29. Placebo - The bitter end
  30. Blondie - Heart of glass
  31. Deorro - Five Hours
  32. The White Stripes - Seven Nation Army
  33. Darude - Sandstorm
  34. Bob Sinclar - World Hold On
  35. Black Box - Ride on Time 
  36. Pink Floyd - Another Brick In The Wall
  37. France Gall - Résiste
  38. Kylie Minogue - Can't Get You Out Of My Head 
  39. Daft Punk - Get Lucky
  40. A-ha - Take on me
  41. Alexandra Stan - Mr. Saxobeat
  42. Renato Carosone - Tu vuo' fa' l'americano 
  43. Nirvana - Smells like teen spirit
  44. Rage against the machine - Killing in the name
  45. Katy Perry - Firework
  46. Fauve - Blizzard
  47. Survivor - Eye of the tiger
  48. INXS - Original Sin
  49. Bee Gees - Night Fever 
  50. The Buggles - Video Killed the Radio Star 
  51. Cold Play - Viva la Vida
  52. Elton John - I'm Still Standing
Oui, pour l’éclectisme, je vous avais prévenu. Je ne pense pas qu'un vrai mélomane puisse se permettre d'aimer des univers aussi éloignés. Mais bon, je suis un béotien donc je m'en tamponne.

Deuxième liste, ma petite playlist "zen"..
  1. Dido - Life for rent
  2. Popcorn Original Song
  3. R.E.M.- Losing My Religion
  4. Fool's Garden - Lemon Tree
  5. Amy Winehouse - Rehab
  6. Mika - Relax, Take It Easy
  7. Birdy - Skinny Love
  8. Daft Punk - Instant Crush ft. Julian Casablancas
  9. Asaf Avidan - One day / Reckoning Song (Wankelmut Remix)
  10. Phoebe Killdeer and The Short Straws - The Fade Out Line
  11. The Mamas & The Papa - California Dreamin
  12. Blackstreet - No Diggity ft. Dr. Dre, Queen Pen
  13. Ray Charles - I Got A Woman 
  14. The Bangles - Eternal Flame
  15. Dido - Paris
  16. Bill Withers - Ain't no sunshine
  17. Alan Parsons Project - Eye in the sky
  18. Keane - Somewhere only we know
  19. The Weeknd - I feel it coming ft. Daft Punk
  20. Scorpions - Wind of change
  21. The Foundations - Build me up Buttercup 
  22. Oasis - Don't Look Back in Anger
  23. Françoise Hardy - Message Personnel
  24. Bonnie Tyler - Total Eclipse of the Heart
  25. Bobby McFerrin - Don't Worry, Be Happy 
  26. Toto - Africa
  27. Protocol Harum - A Whiter Shade of Pale
Bons sons, hein ?

Et puis une autre liste encore de chansons que j'aime bien écouter pour diverses raisons : bon souvenir associé, feeling particulier. Et pis oh, en temps que philistin (ouais, je suis dans la métaphore biblique ce soir), je n'ai pas besoin de me justifier...
  1. Oasis - Wonderwall
  2. Bonnie Tyler - It's a heartache
  3. Joan Jett & the Blackhearts - I love Rock'n'Roll
  4. Eminem - The Real Slim Shady
  5. Bloodhound Gang - The Bad Touch
  6. Modern Talking - You're My Heart, You're My Soul
  7. Modern Talking - Brother Louie
  8. The Cranberries - Zombie
  9. Baltimora - Tarzan Boy
  10. Donna Summer - Last dance
  11. Boney M - Rivers of Babylon
  12. Norman - Internet de l'époque
  13. Dalida & Alain Delon - Paroles, parole
  14. Serge Gainsbourg & Jane Birkin - Je t'aime... moi non plus
  15. Nancy Sinatra - These Boots Are Made for Walkin'
  16. The Avener, Phoebe Killdeer - Fade Out Line
  17. Madonna - Love Profusion
  18. AronChupa - I'm an Albatraoz 
  19. French Cancan - Monsieur Sainte Nitouche
  20. Rolling Stones - Angie
  21. Madonna - Hung Up
  22. Francoise Hardy - Comment Te Dire Adieu
  23. Pink Floyd - Another Brick In The Wall, Part Two
  24. De la soul - All good original
  25. Oldelaf - La tristitude
  26. Talk Talk - Such a shame
  27. Sting - Englishman in New York
  28. P. Lion - Dreams
  29. Madcon - Beggin
  30. Fergie - A little party never killed nobody
  31. The Weeknd - Starboy ft. Daft Punk
  32. Ofenbach - Be mine
  33. Fauve - Kané
  34. Jain - Makeba
  35. Cock Robin - The promise you made
  36. Calvin Harris - This is what you came for ft. Rihanna
  37. Feder - Goodbye ft. Lyse
  38. Orelsan - Suicide social
  39. Orelsan - Jimmy Punchline
  40. The Box Tops - The Letter 
  41. The Police - Every Breath You Take
  42. Depeche Mode - Enjoy The Silence
Voila, ce n'est pas classé, c'est loin d'être exhaustif, mais j'avais envie de le mettre dans un coin de ma mémoire externe. Pour quand Youtube les efface sans prévenir de mes favoris par exemple, et ça arrive souvent...